
Les incontournables sur la myopie en 2025
La myopie, dont la prévalence augmente constamment, a été au cœur de plusieurs publications présentées lors des congrès d’ophtalmologie en 2025. Ces travaux ont exploré les facteurs contribuant à cette hausse, les profils nécessitant une vigilance particulière de la part des professionnels de santé, ainsi que les stratégies optimales pour leur prise en charge.

Le point avec le Pr Nicolas Leveziel, chef de service d’ophtalmologie au CHU de Poitiers.
Si la myopie progresse fortement en Asie, son augmentation est également notable en Europe (1). D’après une méta-analyse récente publiée dans le British Journal of Ophthalmology, la prévalence mondiale atteint désormais 30 %, avec 23 % des enfants de 5 à 12 ans concernés et près de 47 % des adolescents âgés de 13 à 19 ans (2).
« Cette étude présente un intérêt particulier puisqu’elle s’est également penchée sur l’évolution prévue entre 2030 et 2040. Les auteurs estiment que la prévalence de la myopie pourrait atteindre environ 52 % chez les enfants et adolescents en Asie, 24 % en Europe et 26 % en Amérique du Nord d’ici 2030. En 2040, ces chiffres pourraient s’élever à 62 % en Asie, 27 % en Europe et 30 % à 31 % aux États-Unis. Certaines études de prévalence menées dans différents pays confirment ces projections », souligne le Pr Leveziel.
Le dépistage de la myopie, un facteur parmi d’autres
Au-delà des changements de mode de vie, plusieurs facteurs contribuent à la progression de la myopie, notamment un dépistage insuffisant chez l’enfant (3). Une étude allemande menée auprès d’enfants âgés de 6 à 16 ans a ainsi révélé qu’environ un tiers des enfants myopes ne bénéficiaient d’aucune correction optique, mettant en lumière un déficit de dépistage (3).
« Ce problème de dépistage est très probablement identique en France. Un enfant myope, sauf en cas de myopie forte, ne se plaint pas toujours. Avec une myopie de – 1 ou – 2 dioptries, il peut encore voir le tableau en classe ou jouer au football sans difficulté et sa vision de près reste préservée. Il est donc essentiel de procéder à un dépistage avant l’entrée en primaire. Ce dépistage est recommandé, mais pas toujours réalisé. Bien que des examens existent pour les plus jeunes, un dépistage optimisé devrait inclure la cycloplégie (afin de bloquer l’accommodation), l’analyse des antécédents familiaux et l’identification des profils à risque de progression », précise le chef de service d’ophtalmologie.
Profil progresseur, comment le reconnaître ?
Un profil progresseur correspond à un enfant dont la myopie évolue rapidement, avec une augmentation annuelle de l’équivalent sphérique de plus de 0,5 dioptrie ou un allongement axial de 0,2 mm ou plus (4, 5).
Plusieurs facteurs influencent cette progression, pour le Pr Leveziel :
- L’âge : plus l’enfant est jeune, plus la progression est rapide.
- Le degré de myopie : une myopie plus marquée tend à évoluer davantage.
- Le sexe : les filles ont généralement un profil de progression plus rapide que les garçons.
- L’hérédité : un enfant dont les deux parents sont myopes présente un risque accru de progression.
Profil progresseur, quelle stratégie de prise en charge ?
En complément des mesures environnementales classiques, telles que la réduction du temps passé devant les écrans, l’augmentation des activités en extérieur et le respect d’une distance minimale de 30 centimètres lors de l’utilisation d’un écran ou d’un livre, une approche adaptée doit être envisagée en fonction du contexte (5, 6). Chez les jeunes enfants atteints de myopie légère ou marquée, la prise en charge commence généralement par l’atropine ou des dispositifs optiques sans contact, comme les verres freinateurs (7, 8). À partir de 12 ans, les lentilles freinatrices (souples ou rigides) peuvent être une alternative aux lunettes, particulièrement pour les jeunes dont les activités quotidiennes, notamment sportives, rendent leur port contraignant. Leur utilisation requiert toutefois une maturité suffisante ainsi qu’un respect rigoureux des règles d’hygiène (9).
« Face à une réponse insuffisante du traitement freinateur, il est nécessaire de passer à un autre système de freination, mais seulement après avoir écarté les facteurs pouvant expliquer ce manque d’efficacité, tels qu’un suivi inadéquat du traitement, la présence d’une autre pathologie oculaire… », explique le chef de service. Et de préciser : « La seconde phase du traitement repose sur une surveillance régulière de la progression. En cas d’évolution trop rapide, un protocole combiné peut être nécessaire (atropine + verres, atropine + lentilles de jour, atropine + orthokératologie). Enfin, Il est essentiel de poursuivre le traitement tant que l’enfant reste dans un profil de progression, particulièrement entre 7 et 12 ans, période où la myopie tend à progresser le plus rapidement ».
Une étude sur les pratiques des ophtalmologistes européens en matière de freination de la myopie met en évidence un obstacle majeur : la méconnaissance des dispositifs existants, qui représente près de 50 % des freins à leur adoption (10).
« Ces résultats soulignent l’importance d’une sensibilisation renforcée et d’un travail pédagogique approfondi pour favoriser leur utilisation », insiste le Pr Leveziel.
Références
- Baird PN, Saw SM, Lanca C et al. Myopia. Nat Rev Dis Primers. 2020;6(1):99.
- Liang J, Pu Y, Chen J et al. Global prevalence, trend and projection of myopia in children and adolescents from 1990 to 2050: a comprehensive systematic review and meta-analysis. Br J Ophthalmol. 2025;109(3):362‑71.
- Hönekopp A, Tommes LM, Doebler P, Weigelt S. Myopia prevalence, refractive status and uncorrected myopia among primary and secondary school students in Germany. Front Med. 2024;11:1483069.
- Ensemble contre la myopie. L’essentiel à savoir sur la freination de la myopie [en ligne]. [Consulté le 02/06/2025]. Disponible à l’adresse : https://ensemblecontrelamyopie.fr/agir-contre-la-myopie/la-freination-de-la-myopie/lessentiel-a-savoir-sur-la-freination-de-la-myopie/
- Voide N, Kaeser PF. Épidémie de myopie en pédiatrie : prise en charge, prévention et traitement. Rev Med Suisse. 2023;19(855):2407‑11.
- Holden BA, Fricke TR, Wilson DA et al. Global prevalence of myopia and high myopia and temporal trends from 2000 through 2050. Ophthalmology. 2016;123(5):1036‑42.
- Ensemble contre la myopie. Les collyres de freination à base d’atropine [en ligne]. [Consulté le 02/06/2025]. Disponible à l’adresse: https://ensemblecontrelamyopie.fr/agir-contre-la-myopie/la-freination-de-la-myopie/latropine/
- Ensemble contre la myopie. Les verres de freination de la myopie [en ligne]. [Consulté le 02/06/2025]. Disponible à l’adresse : https://ensemblecontrelamyopie.fr/agir-contre-la-myopie/la-freination-de-la-myopie/les-verres-de-freination/
- Ensemble contre la myopie. Les lentilles de jour pour freiner la myopie [en ligne]. [Consulté le 02/06/2025]. Disponible à l’adresse: https://ensemblecontrelamyopie.fr/agir-contre-la-myopie/la-freination-de-la-myopie/les-lentilles-de-freination/les-lentilles-freinatrices-de-jour/
- Martínez-Pérez C, Santodomingo-Rubido J, Villa-Collar C, Whayeb Y, Wolffsohn JS. European trends in attitudes and strategies for myopia management in clinical practice. Cont Lens Anterior Eye. 2025;102390.